Cameroun : Bernard Njonga, le combattant du monde rural s’en est allé le 21 février 2021 à l’âge de 66 ans .

C’est quoi un combattant, si ce n’est celui qui meurt les armes à la main. Bernard Njonga aura combattu jusqu’au bout pour la cause du développement du Cameroun. Un développement qui selon lui, passe par le levier agropastoral et rural.

La conquête de la souveraineté alimentaire du pays était son projet, mieux, son obsession. Personne, n’a pu démentir cet ingénieur agronome sur le fait qu’un pays sous développé à l’instar du Cameroun peut s’élever par sa base, à travers les investissements agropastoraux. Pour étayer sa thèse, Bernard Njonga s’est appuyé sur des structures qu’il a lui-même créées dès 1988 : le Service d’Appui aux Initiatives Locales de Développement (SAILD-ONG), le journal La Voix Du Paysan (LVDP) et le Centre de Documentation pour le Développement Rural (CDRR). Ensuite l’Association de Défense des Intérêts Collectifs (ACDIC-Société civile) en 2003.

Le leitmotiv «Mangeons ce que nous produisons» a animé ses multiples campagnes de plaidoyer au sein de l’ACDIC : contre les découpes de poulets congelés importés, contre le riz subventionné importé, contre les importations astronomiques de farines de blé. Et même contre les mauvaises conditions de voyage par train entre le septentrion et le midi du Cameroun. Ah oui, le train de la honte ! a-t-il dénoncé. Et que dire des tracteurs agricoles plantés dans les herbes à Ebolowa, jamais récoltés!

Nul n’en disconvient, la bataille contre les poulets congelés importés a été gagnée. Et personne n’est mécontent de manger du bon poulet local et de voir une filière avicole nationale puissante et dynamique.

La bataille du pain enrichi aux farines de patate, d’igname, de manioc et de maïs, a été gagnée dans les cœurs des Camerounais à travers le concept Boulangerie vert-rouge-jaune (couleurs du drapeau camerounais) déployé lors du comice agropastoral d’Ebolowa en janvier 2011. Mais la volonté politique n’a pas suivi. C’est l’une des causes et pas la seule, de la mise sur pied du CRAC (Croire au Cameroun), mouvement politique dont Bernard Njonga est le fondateur en octobre 2014. Il espérait enfin faire bouger les lignes par la voie politique.

Les derniers entretiens et interviews de l’homme politique, portent sur les mesures urgentes à prendre pour limiter l’impact de la crise du Covid-19 sur le secteur agricole et alimentaire. Toujours acerbe, le Président national du CRAC invite l’Etat à agir et non plus à réagir. Gouverner c’est prévoir, prévenir vaut mieux que guérir, en effet.

Quand bien même la maladie lui imposait son rythme, Bernard Njonga est resté confiant et déterminé à revenir sur le terrain. Il disait il y a à peine un mois  par téléphone: «Ça va aller, je vais retourner au Cameroun».

Quel retour ! Dans la nuit du 21 au 22 février 2021, à son corps défendant, le grand combattant a perdu la bataille contre la maladie. Il rend l’âme en évacuation sanitaire au CHU d’Amiens en France.

Né le 18 octobre 1957, le chef de famille du feu Pasteur David Ngassa à Bangoua dans l’Ouest du Cameroun, retourne à 66 ans dans l’éternité. Non sans avoir marqué le temps et l’histoire.

DP, ta grosse gueule et tes fous rires nous manquent.

Marie Pauline Voufo

Directrice de rédactions

La Voix Du Paysan/ The Farmer’s Voice

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