Cameroun : Cacao bio-Transition écologique vers les pesticides biologiques

Depuis cinq ans, des groupements de cacaoculteurs accompagnés par la Coopération allemande à travers le projet GIZ-ProCISA dans les régions du Centre et du Sud-Ouest du Cameroun produisent le cacao par des intrants naturels en vue de le certifier bio à terme. Au cours de cette période de transition écologique suivie par des experts de FiBL et de Naturland, les planteurs apprennent à fabriquer des pesticides naturels à base des plantes locales pour traiter leur cacao.

Des centaines de cacaoculteurs camerounais se sont engagés dans la production biologique avec l’appui de la Coopération allemande à travers le Projet Centres d’Innovations vertes pour le Secteur Agro-alimentaire (ProCISA). Six coopératives de producteurs de cacao bio sont encadrées dans ce sens dans les régions du Centre et du Sud-Ouest.
Après trois ans, les coopératives dont les membres auront respecté les cahiers de charges recevront leur certification bio. Un processus normal qui leur ouvrira les portes du marché international du cacao biologique qui est de 15 à 35% plus cher que le cacao conventionnel.
« Nous avons commencé par former les planteurs sur les principes de l’agriculture biologique et après sur la fabrication des intrants à partir des plantes tirées de l’environnement de l’agriculteur. Cela réduit la dépendance à l’égard des intrants externes synthétiques qui sont coûteux et nocifs pour la santé» déclare Gilbert Fomukom, Conseiller Technique de la chaîne de valeur cacao au ProCISA.

Neem, ail et cendre sont anti-capsides

Pour renforcer les capacités des cacaoculteurs dans les techniques de production bio, ProCISA a fait appel à trois experts internationaux de l’Institut de recherche de l’agriculture biologique (FiBL) et de Naturland.
Paul Van Den Berge, expert senior en agriculture biologique, à FiBL relève : «Selon la nouvelle législation européenne, tous les extraits de plantes ne sont pas des biopesticides. Car certains ont des effets néfastes sur la santé humaine pendant leur utilisation.» Fort heureusement, l’extrait de neem est reconnu par l’UE comme pesticide bio. Facile à recueillir par les producteurs, il est efficace pour chasser les insectes.
Michel Simbe, cacaoculteur à Biakoa dans la région du Centre, affirme : « Je fabrique moi-même mon insecticide à base de l’huile de neem et j’y ajoute l’extrait d’ail, la cendre et du savon liquide. Ce mélange est très efficace contre les capsides.»
Njemo Sylvanus Itoe, planteur au Sud-Ouest déclare avoir trouvé une formule révolutionnaire contre les insectes baptisée NEGAMOGI. « Le NEGAMOGI élimine les capsides du cacao et d’autres insectes nuisibles. Il contient les extraits de plusieurs plantes tels le neem, l’ail, le gingembre, le moringa et l’ikongho, un fruit sauvage récolté en forêt» déclare-t-il.
Barbora Tumova, experte en agroforesterie, au département de la coopération internationale à FiBL remarque : « La majorité des cacaoculteurs camerounais que nous suivons opèrent dans un système agroforestier avec d’autres arbres. C’est un atout pour une production durable et rentable. Les agriculteurs augmentent leurs revenus par la vente de plusieurs autres produits que le cacao. » Elle précise: « Les plantations ayant une grande variété d’arbres sont plus résistantes aux effets du changement climatique. Car, les arbres aident le cacaoyer à conserver l’eau en ralentissant le taux d’évapotranspiration. »
La production biologique est ainsi une bonne option pour la préservation de l’écosystème.

Marie Pauline Voufo

 

                                      L’extrait de neem, efficace contre les insectes
Paul Van Den Berge,expert senior en agriculture biologique à FiBL.

«Les pesticides biologiques sont fabriqués à partir des substances naturelles ou dérivées d’organismes vivants tels que les plantes et les animaux. Ils contiennent des éléments actifs qui ciblent les insectes pendant l’accouplement, la reproduction ou l’alimentation. Ils sont largement utilisés contre les ravageurs des cultures tels que les pucerons et les mouches des fruits.
Au Cameroun, le neem est une plante courante aux effets favorables sur la santé humaine et de l’environnement. Les petits agriculteurs des zones rurales l’extraient facilement et le diluent dans de l’eau pour pulvériser les cultures. Associé à une petite quantité de savon comme adjuvant, l’extrait de neem est très efficace contre les attaques d’insectes. »

400 cacaoculteurs bio sont suivis
                                         Barbora Tumova, experte en agroforesterie à FiBL.

«Nous travaillons actuellement avec environ 400 cacaoculteurs au Cameroun, dont 200 dans le Sud-Ouest et plus de 200 dans le Centre. Nous soutenons l’utilisation d’insectifuges à base d’extraits de neem. Ils permettent de lutter contre l’invasion des insectes nuisibles dans le système agroforestier du cacao. Il y aura une évaluation pour déterminer si le cacao des producteurs respecte la norme bio.
En se réunissant en coopératives, les producteurs réduisent les coûts de la procédure de certification. Pour ce début, le projet ProCISA prend en charge une partie des coûts. Les coopératives payeront elles-mêmes les années suivantes»

 

                                 Le NEGAMOGI chasse les nuisibles
Njemo Sylvanus Itoe, cacaoculteur à Konye, Sud-Ouest.

«Pour éliminer les mauvaises herbes dans ma cacaoyère, je défriche et je désherbe à la main. Nous avons commencé l’usage des traitements naturels depuis 2014.
Le NEGAMOGI, fruit de nos recherches, a fait ses preuves contre les nuisibles. Le plus intéressant est qu’il ne nuit pas aux insectes pollinisateurs. Sa matière première est peu coûteuse. L’unique contrainte est qu’il faut beaucoup en produire pour traiter une grande superficie.

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