Le gouvernement camerounais projette d’attribuer une Unité forestière d’aménagement (UFA) et une Vente de coupe aux environs des villages Tête d’éléphant et Liguim à l’Est, bafouant ainsi les droits des communautés. Ces dernières dénoncent.
Les communautés villageoises n’en peuvent plus. «Nous sommes comprimés entre les UFA, le Parc National de Deng Deng, le Parc National du Mbam et Djerem et la zone d’ennoiement du barrage hydroélectrique de Lom Pangar» affirme Pascal Djouldé, notable du village Tête d’éléphant à Bétaré Oya, dans le département du Lom et Djerem à l’Est du Cameroun.
Situé à 176 km de Bertoua, chef-lieu de la région de l’Est, l’arrondissement de Bétaré Oya compte plusieurs villages parmi lesquels Tête d’éléphant, Liguim et Mbitom. Depuis octobre dernier, ces trois villages font l’objet de beaucoup d’attention des médias camerounais du fait des problèmes que vivent leurs populations. Leur espace vital où elles peuvent se mouvoir est réduit comme une peau de chagrin par plusieurs formes d’occupation institutionnelle des terres.
Les populations se sentent abusées par le non-respect de leurs droits.
Non à une UFA à Tête d’éléphant et Liguim
Un projet de création d’une Unité forestière d’aménagement au profit de l’entreprise forestière SIM (Société forestière et industrielle de Mbang) a été initié dans les forêts aux environs des villages Tête d’éléphant et Liguim.
Les villageois s’opposent à ce projet. «Ce que nous avons vu faire dans les villages voisins par les sociétés d’exploitation du bois nous fait mal. Nous avons déjà l’expérience de la mauvaise gestion sociale par les grandes entreprises forestières. Nous n’en voulons pas dans notre village» réagit le chef du village Tête d’éléphant.
Ce sexagénaire renchérit: «Lorsque les grandes sociétés forestières exploitent le bois dans une zone, elles coupent l’essentiel des arbres sans reverser de compensation aux villageois. Leurs engins détruisent les cultures parfois sans dédommagement. Le phénomène se vit dans plusieurs localités.
Cette situation laisse les communautés forestières dans l’inconfort. Elles se retrouvent écartées de la jouissance des revenus issus de l’exploitation forestière.
Droit de préemption bafoué
« Nous avons été surpris de voir des personnes en forêts en train de badigeonner les arbres à la peinture rouge, nous avons cherché à comprendre ce qui se passait, elles nous ont expliqué qu’elles traçaient les limites d’une Vente de coupe qui a été attribuée à un exploitant» explique Bombous, un jeune du village Liguim. Il ajoute: «Nous n’avons pas été informés de l’attribution de cette Vente de coupe».
En majorité des agriculteurs, les habitants de Liguim manquent d’espace pour pratiquer leurs activités. Depuis la création du parc national de Deng Deng en 2010, l’espace vital de cette communauté a considérablement diminué. Aujourd’hui les communautés villageoises assistent impuissant à l’attribution d’une partie des forêts qui leur reste en Vente de coupe. Le même phénomène est vécu dans le village Tête d’éléphant.
Les communautés sont catégoriques et s’opposent à l’exploitation forestière industrielle dans leurs localités du fait de leurs droits de préemption(1) bafoués.
Pascal Djouldé est formel: «Nous ne voulons pas d’UFA. Nous voulons exploiter nous-mêmes nos forêts à travers la foresterie communautaire».
Pour ces communautés, les revenus issus des forêts communautaires contribueraient au développement de leur communauté. Grâce à l’exploitation des 4 forêts communautaires que compte le village, les communautés se félicitent d’avoir réalisé elles-mêmes un foyer communautaire, un marché, des forages et deux salles de classe construites pour l’école primaire.
Clarisse Fombana