Denrée très périssable, la pomme de terre se montre délicate à conserver après récolte. Néanmoins, des techniques et astuces existent pour la stocker sans grandes pertes ; à condition qu’elle soit récoltée à maturité normale.
Les producteurs formés par le Projet Centres d’Innovations Vertes pour le Secteur Agro-alimentaire (ProCISA) dans les régions de l’Adamaoua et de l’Ouest du Cameroun sont unanimes sur l’importance des bonnes pratiques culturales sur la qualité des tubercules de pomme de terre récoltés.
« Laissez la pomme de terre atteindre sa maturité normale avant de la récolter ! Sinon, vous allez souffrir pendant le stockage. La peau va vite quitter sur les tubercules et vous aurez trop de pourriture au magasin » ; ces conseils sont de Norbert Kenfack, producteur chevronné de pomme de terre à Djuttitsa par Bafou dans la Menoua, région de l’Ouest.
La maturité de la pomme de la terre varie selon les variétés. Elle est de 90 jours pour la plupart des variétés cultivées au Cameroun, et de 120 jours spécifiquement pour la Cipira. Récoltées immatures, les pommes de terre ont tendance à perdre leur peau pendant la manipulation, accélérant de fait leur dégradation.
Tout part de la bonne semence
A Rep Yanga par Ngaoundéré dans l’Adamaoua, la Société coopérative des acteurs de la filière pomme de terre de la Vina (Scoops-AFPTV) met l’accent sur le respect des bonnes pratiques culturales pour réussir le stockage. Mohamadou Bassirou, responsable de la coopérative AFPTV affirme : « Tout part de la semence, elle doit être saine, sans être attaquée par les maladies. En champ, il faut être vigilent et soigner sa parcelle. Nous avons amélioré nos techniques de production jusqu’à la récolte et la conservation à travers les formations du projet ProCISA. »
Le magasin de stockage de la coopérative AFPTV à Rep Yanga et celui de la coopérative des Producteurs opérateurs de la filière pomme de terre dans la Menoua (PROPOTEM) à Djuttitsa, sont des lieux de conservation appropriée de semences de pomme de terre. Construits avec l’appui financier du ProCISA, les deux magasins ont chacun, une capacité de 100 tonnes de tubercules. A l’intérieur se trouvent des caissons en bois disposés harmonieusement pour accueillir les tubercules sur plusieurs étages. Les caissons contenant 25 kg de pomme de terre facilite leur manipulation pendant le tri, de même que le traitement du local contre l’invasion des insectes. A Djuttitsa, le local est désinfecté une fois par mois en période froide et deux fois par mois en saison chaude.
La durée de conservation est de trois mois. Au-delà, les tubercules flétrissent et perdent beaucoup de poids.
Les locaux gardent une fraîcheur permanente. « La pomme de terre ne supporte pas la chaleur pendant le stockage. Le constructeur du magasin a prévu un système de ventilation et de contrôle de température interne pour garder les tubercules frais », confie Norbert Kenfack, satisfait du joyau.
Marie Pauline Voufo
A maturité, les tubercules pourrissent peu
Norbert Kenfack, producteur de pomme de terre à Djuttitsa, Ouest.
«Quand les pommes de terre sont récoltées à maturité, les pourries restent au champ. Et on emporte au magasin celles qui sont fermes. Pendant le stockage, elles perdent de l’eau et deviennent plus farineuses. Mais si elles sont récoltées avant terme, celles qui devaient vite pourrir au champ se retrouvent à la maison ou sur le marché et perdent leur valeur.
C’est moi qui fixe le prix de vente de mes pommes de terre aux acheteurs. C’est généralement au-dessus du prix du marché, car je connais leur qualité due à la rigueur que j’y mets. Les connaisseurs ne le discutent pas et sont satisfaits.
Notre magasin peut stocker 100 tonnes
Mohamadou Bassirou, producteur de pomme de terre à Rep Yanga, Adamaoua.
«Avant, nous avions des soucis de stockage de nos pommes de terre ; ce n’est plus le cas maintenant. Avec l’accompagnement du ProCISA, nous savons déjà comment bien cultiver pour bien stocker.
La construction d’un magasin de stockage de 100 tonnes de tubercules sur le site de notre coopérative a renforcé nos capacités d’actions. Ce bâtiment monté en blocs de terre stabilisés est doté de ventilateurs et d’un extracteur de chaleur fonctionnant à l’électricité. Les plaques solaires prévues par le constructeur assurent l’autonomie en énergie électrique.
Nous enregistrons très peu de pourriture de tubercules pendant le stockage. Car nous avons compris que quand les techniques de production sont respectées, il y a peu de soucis de conservation. »