Baccalauréats, Licences, Masters en poche, ils ont pour ambition de devenir de grands fermiers.
C’est un aveu. Celui d’une enseignante dans une école d’agriculture. «Je n’ai jamais été autant bousculée par mes apprenants. La plupart sont des intellectuels. Ils sont ponctuels et hyper motivés. C’est la première fois que je vis ce genre d’expérience professionnelle passionnante.»
Cette enseignante la quarantaine entamée, est technicienne supérieure d’agriculture. A l’Ecole pratique d’Agriculture de Binguéla (EPAB) dans le département de la Mefou et Akono où elle officie, elle forme de futurs aviculteurs. Plus de 500 apprenants ont déjà bénéficié de son expertise.
Des intellos passionnés
Le soleil vient à peine de se lever à Binguéla, petite localité située à une quarantaine de kilomètres de Yaoundé, dans le département de la Mefou et Akono. Les uns après les autres, munis de combinaisons et de bottes, les jeunes apprenants pénètrent dans le bâtiment de production avicole de l’Ecole pratique d’agriculture de Binguéla (EPAB). Ledit espace est également leur champ d’application.
Ils sont une dizaine. Tour à tour, ils nettoient servent et vaccinent les 3000 poussins que compte l’exploitation. Ils vivent une passion commune, l’élevage.
Agée de 30 ans, Mireille a une licence en gestion de projets, obtenue à l’université catholique d’Afrique Centrale. Issue d’une famille d’agriculteurs, elle n’a pas hésité un seul instant avant de troquer son ordinateur contre sa paire de bottes. Son projet, construire une exploitation avicole à la périphérie de Yaoundé. «Je suis venue me faire former comme un ouvrier agricole. Avant de donner des ordres, je dois être capable de savoir quel résultat j’attends de mes futurs ouvriers.» Souligne-t-elle.
Selon le programme de formation en vigueur dans cet établissement, il faut 2 à 3 mois de formation pour être apte à tenir un poulailler. Mireille est loin d’être la seule intello du groupe.
Armelle, 29 ans ingénieur en informatique a tout arrêté pour revenir à la terre. Depuis 2 mois, elle suit une formation dans les grandes cultures. Au bout de 4 mois, elle sera apte à créer une palmeraie, une cacaoyère, et surtout une bananeraie, son rêve. Elle confie: «En tant que jeune femme, j’ai compris que la seule activité qui puisse me donner mon indépendance c’est l’agriculture.»
Bien avant la fin de sa formation, Armelle en collaboration avec un camarade vient de lancer une pépinière, base de sa future bananeraie. Dans un an demi, elle pourra jouir des premiers fruits de son labeur.
Appui des partenaires
Hugues, 32 ans, titulaire d’une maitrise en communication, donne progressivement un sens à son projet. Dans quelques semaines, sa plate-forme internet dédiée à la vente des produits agricoles verra le jour. Son rêve va se réaliser grâce à l’appui du Programme de promotion de l’entreprenariat agropastorale des jeunes (PEA-Jeunes) financé par le Fonds international pour le développement agricole (FIDA). A l’issue d’un renforcement de capacité de 60 jours, son business plan sera présenté devant les institutions financières où il pourra bénéficier d’un important appui financier.
Eric, 25 ans et licencié en Biologie animale de l’Université de Yaoundé I, est à la recherche d’un espace pour y construire un bâtiment de production avicole pour 5000 sujets. Son financement viendra d’un incubateur d’entreprises par lequel il est passé. Il dit être soutenu dans cet élan par des institutions publiques.
Pour le jeune Eric comme pour ses camarades en formation à Binguéla, la pratique de l’agriculture et de l’élevage au Cameroun a de plus en plus besoin de têtes bien faites.
Alain Georges Lietbouo
Correspondance particulière