L’Acdic veut suivre la production des semences de maïs

Une récente étude de l’Acdic démontre que malgré les évolutions enregistrées en termes de production de semences, la filière maïs au Cameroun reste plombée par la mal gouvernance.

Dès lors, des producteurs se proposent comme interlocuteurs pour mieux assurer le suivi sur le terrain.

La restitution de l’étude sur la filière maïs menée de février 2014 à février 2015 par l’Association citoyenne de défense des intérêts collectifs (Acdic) en partenariat avec le Programme d’appui à la société civile (Pasc) a donné lieu, le 4 mai dernier à Yaoundé, à une salve de recommandations dont celle de confier le suivi de l’activité semencière aux acteurs non étatiques.

L’Acdic constate que sa dénonciation des détournements de fonds destinés au financement de la production de semences du maïs en 2008 a certes contribué à corriger quelques dysfonctionnements observés dans la conduite de cette activité par le Programme national d’appui à la filière maïs (Pnafm). Mais, malgré les évolutions enregistrées, notamment l’augmentation de la production de semences et leur distribution aux agriculteurs par le Ministère de l’agriculture et du développement rural (Minader), on continue d’importer le maïs pour satisfaire la demande locale. D’après l’Acdic, la production nationale du maïs qui oscille depuis 2009 autour de 1.600.000 (un million six cent mille) tonnes par an, reste très inférieure à la demande locale.

Ce ne sont pourtant pas les moyens qui manquent. En plus des appuis du Pnafm, plusieurs autres projets et programmes du Minader accordent une multiplicité de financements aux producteurs ou aux groupements de producteurs.

Non respect du calendrier agricole
Pour avoir une idée de l’effectivité des appuis reçus et des canaux par lesquels les agriculteurs ont  eu connaissance de l’existence des appuis du Pnafm, l’Acdic a interrogé plus d’une centaine de bénéficiaires dans cinq régions sur les dix que compte le Cameroun: Centre, Sud, Est, Ouest, Adamaoua. Il en ressort globalement que :

– Aucun bénéficiaire n’a été informé de l’existence des appuis par voie de média. L’information sur le Programme se diffuse à 90%  entre amis et/ou collègues du Minader.
– Tous les bénéficiaires ont reçu les semences de base et 95% d’entre eux les ont mises en champ. Mais 10 % des bénéficiaires disent avoir reçu de mauvais pesticides.

– Il n’existe pas de contrat formel entre le Pnafm et les producteurs de semences. Si contrat il y a, il est verbal.
– Le Programme n’a pas respecté le calendrier agricole lors de la remise des semences aux producteurs dans certaines régions.
– En moyenne 17% des bénéficiaires sont effectivement spécialisés dans la multiplication des semences. Il y a ainsi non respect des conditions d’éligibilité selon le code de procédures du Programme. Néanmoins, les responsables du Pnafm affirment avoir formé tous les bénéficiaires.

– Tous les bénéficiaires reconnaissent toutefois avoir reçu  au moins à deux reprises des contrôleurs du Minader dans leurs exploitations. Sur ce critère, le Pnafm et le Minader marquent de bons points, même comme, selon certains bénéficiaires, quelques contrôleurs ont parfois exigé des frais de carburant aux producteurs.
En somme, conclut l’Acdic, si le Pnafm n’a pas réussi à créer une interprofession pour le maïs comme le prévoyait son cahier de charges, c’est à cause des multiples dysfonctionnements dus à l’absence d’un interlocuteur crédible capable de défendre les intérêts des producteurs, de plaider et d’influencer les structures d’appuis.

Nécessaire plaidoyer
L’Acdic propose la création d’un réseau de producteurs de maïs et de multiplicateurs de semences. Cet acteur devra veiller sur la gestion des financements alloués à la filière, faciliter les échanges d’expériences et de données, développer des stratégies de commercialisation de la production et travailler à résorber le déficit de maïs. Car, du maïs, on en voudra encore et toujours au Cameroun.
Jean Kana

Déclaration des acteurs non étatiques de la filière maïs pour la création d’un réseau

Nous, producteurs de maïs de consommation, multiplicateurs de semences de maïs, issus d’organisations paysannes ou non, et réunis à Yaoundé le 04 mai 2015 :

Prenant en compte :
Les résultats de l’étude sur le suivi des financements destinés à la filière maïs.
Considérant que :
– L’offre de maïs reste faible à cause des problèmes de gouvernance,
– La transparence dans la gestion, la prise en compte de chaque acteur et l’organisation de la filière permettraient de résorber le déficit de maïs.
Observant que :
Le Programme National d’Appui à la Filière Maïs (PNAFM), jusqu’à présent, n’a pu structurer la filière maïs conformément aux dispositions prévues dans son cahier de charges.
Prenant acte de ce que :
De nombreux dysfonctionnements perdurent dans le processus de gestion des subventions, à cause de l’absence d’un interlocuteur crédible capable de négocier, d’influencer les structures d’appuis et de défendre les intérêts des producteurs.

Proposons :
La création d’un réseau de producteurs de maïs, de multiplicateurs de semences, de vendeurs d’intrants et de consommateurs, dans le but de :
1. défendre les intérêts des acteurs de la filière,
2. faciliter les échanges de données,
3. faciliter les échanges d’expériences,
4. veiller sur la gestion des financements alloués à la filière maïs,
5. assurer l’accès des producteurs aux intrants agricoles,
6. développer des stratégies de commercialisation de leurs productions,
7. résorber le déficit de maïs.
L’Association Citoyenne de Défense des Intérêts Collectifs (ACDIC) accompagnera les acteurs dans la mise en place de ce réseau.

Trois outils existent d’ores et déjà :
– Un site internet (www.financementmaïs.com)
– Un système de SMS-Mailing.
– Une émission radio (Fréquence Agricole).

Fait à Yaoundé, le 04 mai 2015
Les participants (membres des organisations de producteurs et de la société civile)

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