L’objectif originel du travail manuel (TM) en milieu scolaire était de donner aux élèves des connaissances sur la pratique de l’agriculture, de l’élevage et des métiers artisanaux. Beaucoup d’établissements scolaires s’en sont éloignés.
Le 29 octobre 2014, le Ministre des enseignements secondaires (MINESEC), Louis BAPES BAPES, a signé une circulaire rappelant la vocation de la matière appelée «Travail manuel» (TM), à ses délégués régionaux et départementaux ainsi qu’aux chefs d’établissements d’enseignement secondaire.
La circulaire commence par ces termes: «Il m’est revenu qu’un nombre de plus en plus élevé des chefs d’établissement restreignent le travail manuel au balayage des salles de classes et des cours de recréation.» Le MINESEC poursuit: «Afin de mettre un terme à cette pratique qui n’apporte aucune plus-value aux élèves, j’ai l’honneur de vous rappeler les prescriptions suivantes: le travail manuel est toute activité de production ou de service ayant un caractère d’intérêt général, qui tend à faire acquérir à l’élève l’habileté manuelle, le goût de la création, la conscience de ses responsabilités de développement du pays. Il n’est pas une sanction.»
Cette circulaire se termine par ces propos du MINESEC: «Je tiens la main haute pour l’application sans faille de la présente circulaire, à laquelle aucune entorse ne sera tolérée.»
Punition pour les bavards
Des failles, il y en a beaucoup eu et cela, pendant des années. Si le travail manuel était pris à sa juste valeur, peut-être que beaucoup de Camerounais auraient compris dès leur jeune âge que le métier d’agriculteur ou d’artisan mérite autant de considération que celui de cadre d’administration.
La circulaire du MINESEC n’est pas la première. 13 ans auparavant, c’est-à-dire le 14 août 2001, un arrêté du Ministère de l’éducation nationale organisait le travail manuel et le rendait obligatoire pour tous les élèves du Cameroun. A la lecture de ce texte, les exploitations agricoles, fermières et artisanales devaient être mises en place dans les établissements primaires et secondaires et être gérées comme des entreprises coopératives, produisant même des revenus aux établissements.
Le secteur agropastoral n’est-il pas le premier employeur au Cameroun? Le pays dispose un potentiel agro écologique considérable. Etonnant qu’on en soit encore aujourd’hui à rappeler l’importance du travail manuel, et donc agricole et artisanal, aux chefs d’établissements scolaires.
Sur le terrain, on observe que chaque établissement aborde le TM à sa manière. Tantôt ça consiste à nettoyer les toilettes et débroussailler les alentours des salles de classes. Tantôt et c’est là le pire, le travail manuel est utilisé comme punition infligée aux bavards et récalcitrants.
Sur les bulletins des élèves, la notation du TM figure généralement en dernière ligne après toutes les autres matières. Dans certains cas, cette note n’est pas mentionnée sur les bulletins. Rien à voir avec l’Arrêté interministériel du 19 octobre 1979 instituant le travail manuel comme une matière à part entière dans le programme scolaire.
Estelle Ngo Bougha
UN LYCEE AGRICOLE POUR 2015
Emboîtant le pas aux structures privées, l’Etat a annoncé l’ouverture d’un établissement secondaire des métiers agropastoraux pour l’année prochaine.
Jusqu’à présent au Cameroun, les seuls établissements d’enseignement secondaire délivrant des baccalauréats à vocation agricole, sont privés et sont situés dans des zones rurales. On a certes les Ecoles techniques d’agriculture (ETA), mais ce sont structures de formation professionnelle promues par le Ministère en charge de l’agriculture et non de l’éducation nationale.
Récemment, le Ministère des enseignements secondaires (MINESEC) a enfin annoncé la création d’un lycée agricole à Yabassi dans le département du Nkam. Cet établissement, produit d’un don chinois, est encore en construction. Le lancement des cours est prévu pour la prochaine rentrée scolaire.
«Ce lycée aura la particularité de former des élèves dans les métiers agropastoraux. Nous avons recruté un personnel enseignant compétent et sommes en train d’élaborer un programme adapté pour ce type d‘établissement. L’Etat envisage de créer dans chaque zone agro écologique du Cameroun un lycée agricole de la même trame.» confie M. BELLO, inspecteur coordonnateur général chargé de la vie scolaire au MINESEC.
Mais une promotion permanente doit être faite auprès des élèves pour leur vendre le rêve agricole. En effet, un enfant a besoin de rêver d’un métier pour l’exercer avec fierté.
Pour être prise à sa juste valeur, l’agriculture doit cesser d’être vue comme un secteur d’activités dans lequel on s’engouffre lorsqu’on a tout essayé en vain, ou lorsqu’on va en retraite et qu’on ne sait quoi faire pour boucher les fins du mois. Et si le Lycée suscitait des vocations agricoles!
ENB
AGRICULTURE, ELEVAGE ET ARTISANAT SONT LES VOLETS DU TM
Matière obligatoire dans le programme scolaire au Cameroun, le travail manuel intègre les activités qui encouragent la créativité chez l’élève.
Le travail manuel est une matière obligatoire qui doit être enseignée sur le plan théorique et pratique. Il intègre deux volets: les activités de production (agriculture, élevage et artisanat) et les activités de service (entretien, peinture). L’objectif est de permettre à l’élève d’acquérir l’habileté manuelle, le goût de la création et une meilleure considération des métiers agropastoraux et artisanaux.
Selon l’arrêté n°242/L/729/MINEDUC/MJS du 15 octobre 1979 portant organisation des activités périscolaires, il est exigé que dans la gestion des frais scolaires, qu’une quote-part soit attribuée aux travaux manuels. Les quotes-parts des contributions exigibles allouées au travail manuel doivent être utilisées pour l’acquisition des outils et matériels (houe, râteaux, balais, etc.), des semences et des autres intrants agropastoraux, des terrains en vue de la création des jardins, champs et autres exploitations scolaires, de l’enseignement pratique par des personnes ressources compétentes en vue de la promotion de l’esprit d’entreprise et de créativité des apprenants dans des activités agropastorales, de menuiserie et d’artisanat ou de service d’entretien, d’aménagement et d’équipement. «C’est ce que devrait être le travail manuel dans nos établissements d‘enseignement secondaire» explique M. BELLO, inspecteur coordonnateur général chargé de la vie scolaire au MINESEC à Yaoundé.
Mais sur le terrain, l’application de la circulaire n’est pas visible. Il ne s’agit pas d’apprendre vaguement aux enfants à viabiliser un jardin ou un terrain, mais bien au-delà, à leur faire apprendre par des personnes compétentes dans le domaine agropastoral, à voir d’un bon œil le métier d’agriculteur ou d’éleveur comme c’est le cas pour le métier de médecin ou d’avocat pour ne citer que ces exemples. L’objectif en filigrane étant que l’élève puisse choisir sans complexe ni préjugé, d’exercer des métiers agropastoraux après ses études, s’il le souhaite.
ENB